La thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT)

La thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT pour acceptance and commitment therapy) est une psychothérapie appartenant à la troisième vague des thérapies comportementales et cognitives (TCC). Mise au point par Steven Hayes (dont les travaux initiaux remontent à la première moitié des années 1980), l’ACT combine des techniques de pleine conscience d’origine bouddhiste à l’activation comportementale et aux méthodes issues de la nouvelle analyse du langage et de la cognition qui la sous-tend – la Théorie des Cadres Relationnels. C’est une thérapie fondée dans la méthode scientifique, en lien constant avec la recherche, et qui a montré son efficacité depuis une vingtaine d’années pour toutes les catégories de troubles psychologiques (cf. infra).

Le postulat de départ en thérapie d’acceptation et d’engagement est que la souffrance n’est pas signe de pathologie, mais une partie intégrante de l’expérience humaine. Nous sommes des êtres sensibles, nous ressentons le plaisir et la douleur. Aussi désagréables soient-elles, les émotions négatives sont utiles et s’inscrivent dans le fonctionnement normal de l’esprit. La peur, la colère ou encore la tristesse sont essentielles car elles nous alertent sur ce qui ne va pas. Une métaphore classique consiste à les comparer aux voyants sur le tableau de bord d’une voiture : si l’on ne tient pas compte du voyant qui s’allume, ou que l’on débranche le fil du voyant parce que cela nous déplaît, il y a de fortes chances pour que l’on casse le moteur… D’autre part, qu’on le veuille ou non, certains malheurs sont inévitables et nous rencontrons parfois des problèmes insolubles. Il suffit pour s’en convaincre de considérer la question de la mort et du deuil. Une fois de plus, la souffrance est inhérente à la condition humaine, l’éprouver n’est pas pathologique. Pour reprendre Viktor Frankl lorsqu’il cite Edith Weisskopf-Joelson :

« Notre philosophie de l’hygiène mentale insiste d’ordinaire sur l’idée que les gens devraient être heureux, et que le malheur est un symptôme d’inadaptation.Une telle conception, valorisée par le système culturel, est sans doute responsable de ce que le fardeau d’un malheur inévitable s’accroît du malheur de ne pas être heureux. »Découvrir un sens à sa vie avec la logothérapieViktor Frankl (1962, ed. française 2006)

Les recherches sur lesquelles s’appuie l’ACT ont montré qu’un des problèmes majeurs dans les troubles psychologiques est la tendance naturelle à l’évitement des expériences psychologiques ou émotionnelles désagréables. Autrement dit, le problème n’est pas tant d’avoir mal que de ne pas supporter d’avoir mal. Les évitements expérientiels sous-tendent les troubles lorsqu’ils interfèrent avec ce qui compte réellement pour le patient, quand ils n’apportent pas durablement les résultats escomptés et qu’ils doivent être perpétuellement renouvelés (cf. figure 1).

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Figure 1 : Evitement expérientiel problématique

Les évitements sont efficaces à court terme (soulagement), mais deviennent rapidement plus problématiques que les souffrances qu’ils cherchent à contrôler : la fuite dans certaines situations pour se soustraire à la peur chez un patient phobique, la rumination pour résoudre la tristesse chez un patient dépressif, les rituels pour repousser les obsessions chez un patient souffrant de trouble obsessionnel-compulsif, l’hyperactivité pour échapper à la réactivation de souvenirs chez un patient traumatisé, les scarifications, les compulsions alimentaires ou encore la consommation de substances (alcool, drogues) pour anesthésier des affects négatifs… Les patients se retrouvent pris au piège dans les sables mouvants de la souffrance : plus ils se débattent, plus ils s’enfoncent !

Ainsi, l’ACT consiste à changer la façon dont le patient considère ses émotions et ses pensées, d’entraîner une manière différente et plus flexible d’interagir avec son expérience intérieure. Au lieu de lutter en vain pour faire disparaître les événements psychologiques perçus comme négatifs, il s’agit d’apprendre progressivement à dégager cette énergie pour s’engager dans des actions qui comptent réellement pour chacun, qui enrichissent l’existence. L’ACT propose de rééquilibrer la psychothérapie afin de moins lutter contre et de plus œuvrer pour : pour un meilleur fonctionnement, pour une vie plus en accord avec ses valeurs. L’ACT promeut la flexibilité psychologique, c’est-à-dire la capacité à pouvoir engager les actions importantes pour soi–même en présence de pensées négatives, d’émotions menaçantes, de souvenirs traumatiques ou de sensations douloureuses.

Dans le prolongement direct des interventions basées sur la mindfulness, l’ACT est une thérapie expérientielle – dans laquelle sont utilisés de nombreux exercices et métaphores – organisée en 6 axes thérapeutiques (cf. figure 2) :

  • L’acceptation, qui permet d’accueillir ses ressentis inconfortables ;
  • La défusion, qui permet de se distancer de ses pensées ;
  • Le contact avec l’instant présent, qui permet de se connecter à son expérience du moment ;
  • Le soi comme contexte, qui élargit le sens de soi et offre une base de sécurité ;
  • Les valeurs, qui connectent avec ce qui est important pour soi ;
  • L’action engagée, qui permet d’agir en phase avec ses valeurs.
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Figure 2 : le modèle ACT organisé en six axes thérapeutiques – l’hexaflex

L’ACT se rapproche des thérapies existentielles et humanistes dans la mesure où c’est au patient d’identifier et de définir librement ses propres valeurs et de choisir les actions permettant de les mettre en œuvres.

Des essais cliniques contrôlés randomisés ont montré l’effet bénéfique de cette approche dans des troubles psychiatriques aussi variés que les troubles de l’humeur, les troubles anxieux, les troubles psychotiques, les troubles addictifs, les troubles du comportement alimentaire, la trichotillomanie ainsi que le trouble de la personnalité borderline. L’ACT a également montré son utilité dans la prise en charge de la douleur chronique, la gestion du stress au travail et la souffrance psychologique des patients atteints de maladie chronique. Les études démontrant l’efficacité de la thérapie d’acceptation et d’engagement sont suffisamment nombreuses pour donner lieu à des méta-analyses et des revues de la littérature qui mettent en évidence l’efficacité de cette psychothérapie.

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